Un cavalier arriva à toute hâte au centre d'un petit village, perdu quelque part dans les contrées humaines de Hurlevent. Son plastron était défoncé de toutes parts et des coulées de sang tombaient le long de son visage. D'un violent coup de bride, il stoppa sa monture et hurla jusqu'à perdre haleine :
« Sonnez l'tocsin, les peaux vertes sont de retour ! »

Le jeune Lernst palpa la fine côte de mailles qu'il venait de revêtir. A seulement quinze ans, il n'avait jamais eu à porter une armure. C'est le coeur battant et les yeux humides de peur qu'il empoigna sa hache et alla rejoindre les autres miliciens. Tous étaient des civils venant de sortir de l'hôtel de ville, où on leur avait donné de quoi se battre.
« En rang messieurs ! Dans leur pitoyable fuite, les orcs semblent avoir décidé de nous en faire baver un maximum, hurla un gros monsieur qui semblait être le maire local, on dit qu'ils pillent tout ce qui se trouve sur la route de leur retraite, mais nous n'allons pas laisser nos habitations à ces rats infects ! » Ainsi, le magistrat obèse ordonna d'avancer à la petite troupe de militaires de fortune.

Serrant ses doigts frêles contre le manche de son arme, Lernst marchait tant bien que mal. Même si le combat n'avait pas encore commencé, ses genoux tremblants peinaient déjà à le porter. La guerre a toujours eu ce genre d'effet néfaste sur les âmes sensibles mais ils furent décuplés chez le jeune garçon. La main calleuse d'un vétéran vint ébouriffer ses cheveux cuivrés et gras, se voulant réconfortante.
« Eh bah mon p'tit ! C'est ta première bataille ? lança le vieux gaillard, le port altier et le pas ferme.
— O-oui m'sieur, j'ai jamais été au casse-pipe, répondit Lernst avec mauvaise assurance. Accompagné d'mon papa, j'ai bien tué un ours une fois, et même que... »

Une énorme explosion retentit. Le chétif rouquin fut coupé dans son semblant de récit par le début des hostilités.

Le sol trembla et l'espèce d'armée humaine fut séparée en plusieurs groupes éparses. Un projectile enflammé venait de percuter le sol, carbonisant rapidement ce dernier. Des cris retentirent. Quoi que la plupart des forces militaires orques avaient été défaites à la fin de la seconde guerre, les grunts restants se battaient avec la hargne du désespoir. Devant la rage des ennemis, la troupe de paysans armés ne fit pas le poids, trop peu entrainée et pas assez bien armée.

Le maire qui avait envoyé sa milice à la mort avait déjà prit la poudre d'escampette et les défenseurs improvisés partirent bientôt aux cris de « sauve qui peut ! ».

Fermant les yeux pour de pas voir son visage éclaboussé de sang, Lernst planta sa hache dans l'épaule de l'un de ceux que l'on nommait les peaux vertes. Il lâcha son arme, la laissant dans le corps de son adversaire en furie. Regardant les paumes de ses mains chancelantes, qui étaient pleines d'échardes de bois, il considéra la déroute de son propre camp puis résolut de prendre ses jambes à son cou. Aussi alla-t-il se cacher dans les bas côtés, à l'abris de buissons touffus qui foisonnent dans les luxuriantes forêts d'Azeroth. Le cadet termina l'escarmouche en couvrant les bruits du massacre par quelques sanglots et gémissements.

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Engagez-vous qu'il disait Lothar, rengagez-vous !